Via Cluny : une nouvelle voie de 550 km pour découvrir l’histoire de l’Europe médiévale

Cluny: dans l'esprit de tous, ce nom est associé à la puissante abbaye fondée en 910 qui – avec plus de 2000 dépendances! – rayonna sur l'Europe médiévale, et dont l'héritage couvre de nombreux domaines (architecture, sculpture, peinture, manuscrits enluminés ou bien encore musique). Mais on connaît moins les deux grands sites monastiques bénédictins du Jura qui sont à l'origine de cette fondation. «C'est en effet de cette région qu'en 909, l'abbé Bernon, accompagné de six moines de Gigny et six moines de Baume-les-Messieurs, partit fonder cette abbaye, à la demande Guillaume le Pieux, duc d'Aquitaine », raconte Marie-Jeanne Lambert, alors conservateur en chef du Patrimoine pour le département du Jura chargée du suivi des manifestations liées à Cluny.

Une idée née d’un anniversaire

En 2009 et 2010, lors des festivités qui commémorèrent cette fondation, des randonneurs relièrent Baume-les-Messieurs à Gigny, puis Gigny à Cluny. « C'est alors que la Fédération européenne des sites clunisiens, dont le réseau est reconnu “Grand Itinéraire culturel” par le Conseil de l'Europe, émit l'idée de créer un itinéraire de randonnée qui relierait ces lieux et se prolongerait jusqu'en Suisse, où se trouvent plusieurs sites clunisiens », poursuit Marie-Jeanne Lambert.

Le défi fut relevé, grâce à une petite équipe de bénévoles passionnés de randonnée, d'histoire et de patrimoine. «Le 12 février 2016, nous avons créé une association, intitulée Chemin de Cluny Franche-Comté-Bourgogne, explique Robert Gros, son président. Puis nous avons défini un tracé reliant 26 sites clunisiens entre Payerne (Suisse) et Cluny. »

Un itinéraire, des variantes, des boucles

L'itinéraire principal, qui s'étend sur 550 km (dont 163 en Suisse), peut être parcouru en 26 étapes. «Mais le randonneur doit prendre son temps, commente Marie-Jeanne Lambert. Nombreux sont en effet les trésors à découvrir en chemin: patrimoine architectural, paysages variés, faune et flore, savoir-faire ancestraux, sans oublier la gastronomie des territoires traversés!»

Quant aux sites clunisiens reliés par ce parcours, ils se révéleront d'autant mieux à ceux qui les rejoindront à la faveur de leurs pas. Parmi eux : l'île Saint-Pierre (Suisse) et son bourg médiéval; Saint-Point (Doubs), situé au bord d'un lac; Saint-Lothain (Jura), dans le vignoble, avec sa belle crypte; Vaux-sur-Poligny (Jura), siège d'un ancien grand séminaire; Poligny (Jura) et son ancienne église de Notre-Dame de Mouthier-le-Vieillard; Baume-les-Messieurs et Gigny (Jura), dont les abbayes sont bien conservées; Cuisery (Saône-et-Loire), village du livre; et bien sûr Cluny (Saône-et-Loire), la maison mère.

«Cette longue randonnée peut s'effectuer en continu, ou en choisissant quelques étapes, remarque Marie-Jeanne Lambert. Deux variantes d'accès, au départ de Morteau(Doubs) et Dole (Jura), rejoignent également cet itinéraire. Et pour ceux qui disposent d'une seule journée, 11 boucles de randonnée autour de sites clunisiens ou patrimoniaux majeurs sont proposées. Enfin, à l'attention des pèlerins de Saint-Jacques, l'itinéraire principal relie deux voies jacquaires: la Via Jacobi (Rorschach – Genève) qui traverse la Suisse et la Via Podiensis, entre Le Puy-en-Velay (Haute-Loire) et Saint-Jean-Pied-de-Port (Pyrénées-Atlantique). »

Échos du chemin

Les retours des premiers randonneurs sont enthousiastes. «Unanimes pour dire que cette randonnée a été particulièrement réussie, commente Monique, qui effectue l'itinéraire par étapes avec quatre amies. L'impression qui reste est celle d'une grande quiétude, de silence, de vivre dans un autre monde: belle déconnexion. Des images de chevaux en liberté dans un immense pré resteront gravées ainsi que la descente vers Romainmôtier (Suisse) et la découverte de l'abbatiale qui inonde de sérénité ce village: beauté à couper le souffle.»

Et Robert Bessard, qui a parcouru l'ensemble de l'itinéraire, de renchérir: «J'ai été comblé par les paysages variés et le patrimoine en tout genre. J'ai été touché par ce que laisse à penser l'importance qu'ont eue les sites clunisiens. Des habitants m'ont parfois hébergé, d'autres m'ont ravitaillé, ils m'ont manifesté beaucoup de sympathie. Je les remercie. J'encourage tous ceux qui veulent s'intéresser à l'épopée de Cluny à mettre leurs pas dans ceux de ces moines qui ont marqué l'histoire, l'histoire religieuse, culturelle, architecturale…»

Préparer sa randonnée

Pour les randonneurs qui veulent se lancer dans l'aventure, l'association Chemin de Cluny Franche-Comté-Bourgogne met à disposition de nombreux outils. Le site internet, véritable boîte à outils, fourmille d'informations pratiques (tracés GPX et PDF, listes des hébergements et ravitaillements, liens vers les offices de tourisme, accès et transports, événements à venir) et plus de 100 notices consacrées aux lieux traversés. Toutes ces données sont également accessibles via une carte interactive régulièrement mise à jour.

«On peut effectuer le chemin dans les deux sens, pour l'instant à pied. L'option vélo est à l'étude», ajoute Marie-Jeanne Lambert. La matérialisation du balisage n'existant pas en Suisse, il convient de privilégier les applications pour smartphone avec les traces GPX. En France, l'itinéraire est entièrement balisé par la Fédération française de la randonnée pédestre (GR® et GRP®). Le logo utilisé est celui de la Fédération européenne des Sites clunisiens, qui reprend les armes de Cluny: deux clés d'or traversées d'une épée.

L'association propose aussi des randonnées accompagnées qui reprendront au printemps. Randonneurs de l'Hexagone et de toute l'Europe, une grande page de l'histoire médiévale vous attend!