« L’étincelle s’allume dans l’action. »
(extrait du titre d’un article de Michael Löwy sur la pensée de Rosa Luxemburg)
Depuis une vingtaine d’années, le renouveau de l’éducation populaire accumule théorisation, méthode et expériences multiples dans de nombreux secteurs. Aujourd’hui il « fait mouvement » autour des valeurs fortes d’émancipation et de lutte contre la domination d’un système capitaliste qui s’impose partout comme le seul modèle possible.
Ce système d’accumulation illimitée et d’appropriation privée prospère par sa capacité à investir non seulement le champ économique, mais, dans une accélération toujours plus vertigineuse, tous les champs de l’activité humaine, qu’elle soit publique, privée, matérielle ou spirituelle.
C’est face à ce rouleau compresseur que les militants de ce renouveau de l’éducation populaire ont résisté en développant des moyens qui visent à rendre lisibles aux yeux du plus grand nombre les rapports de domination, les antagonismes sociaux, les rouages de l’exploitation.
L’ardeur s’inscrit aujourd’hui dans ce mouvement avec une mission précise d’engagement dans le monde militant pour coopérer à une transformation sociale, et reprendre ainsi la main face aux visées de la domination toujours à l’œuvre.
Nous voulons forger ces alliances sur la base du programme suivant :
S’approprier notre histoire
Parce que des pans de notre histoire sont usurpés ou volontairement maintenus dans l’oubli. Parce que les luttes collectives passées peuvent redoutablement outiller celles en cours et celles à venir. Parce que la connaissance de l’histoire permet d’anticiper, d’identifier les régressions dans les modernisations annoncées, et d’échapper à la fatalité en comprenant que le naturel est un construit qui peut donc être défait. Parce que nous comprenons et assumons le caractère central de notre histoire et des combats qui nous ont précédés, et parce que nous voulons prolonger leurs conquêtes, celles qui ont fait reculer concrètement le capitalisme, nous nous donnons comme priorité l’appropriation de notre histoire. Que l’identification du « déjà-là » qui subvertit le capital rende crédible et possible une autre façon de faire société, et que la connaissance de l’histoire des conquêtes nous donne les moyens de les actualiser.
Combattre avec le Langage
Parce que les mots ne sont jamais neutres ni purement informatifs, qu’ils produisent des effets sur nos façons de penser et d’agir sur le réel, parce que la disparition de certains ne doit rien au hasard, que d’autres se propagent et qu’en les employant nous légitimons à notre insu ce que nous combattons, nous sommes déterminés à interroger l’apparente innocence des mots et leur supposée évidence, à décortiquer leurs sens, à révéler d’où ils viennent, l’idéologie et les intérêts dont ils sont porteurs, à construire la résistance à ceux qui nous asservissent et la réhabilitation de ceux qui nous émancipent. Que le travail sur le langage devienne ce qu’il doit être : une dimension essentielle et concrète de notre lutte politique.
Renforcer le pouvoir d’agir
Parce que nous voulons contribuer au renforcement d’un pouvoir d’agir non réductible à la critique et à la résistance, mais entendu comme offensive et capacité d’élaboration d’une autre façon de faire société, nous travaillerons à ce que la connaissance sorte des livres pour servir les luttes, et que les savoirs sociaux stratégiques, essentiels à la transformation sociale, dont nous sommes tous détenteurs, soient partagés. Que les savoirs livresques et d’expérience politique nous permettent de comprendre les logiques de domination, mais surtout de nous en affranchir.
Faire collectif
Parce qu’il n’est plus rare de croiser des militants et des travailleurs isolés, en souffrance, découragés voire fatalistes, nous voulons contribuer à penser et à réunir les conditions du réveil du désir politique, de son maintien dans la durée, de la pérennité des collectifs et de la solidarité de leurs membres. Que l’émotion soit mobilisatrice, les savoirs émancipateurs, et que leur transmission rassemble.